Vers une inclusion plus poussée pour l’assurance de prêt ?

De nos jours, les assureurs ont tendance à imposer des surprimes et à opposer systématiquement des refus aux profils vulnérables, notamment les personnes atteintes de maladies graves ou percevant de faibles revenus. Cette pratique, particulièrement discriminante, exclut des individus ayant pourtant réellement besoin d’aide, ce qui semble très contradictoire avec la mission première de ces professionnels, qui consiste à protéger. Plusieurs dispositifs ont vu le jour afin de favoriser l’inclusion dans le milieu des assurances, à commencer par la loi Lemoine en 2022. Assfi vous propose ici un aperçu de la situation.

L’Association Internationale des Contrôleurs d’Assurance, AICA, a mis au point cette définition de l’assurance inclusive : « tout produit d’assurance destiné aux segments du marché exclus ou mal servis en général, plutôt que ciblant exclusivement les pauvres et les personnes à faibles revenus dans une acception étroite ». En d’autres termes, une assurance inclusive s’adresse à tous les profils dits « à risque », qui correspondent à des publics variés, comme les chômeurs longue durée, les travailleurs reconnus handicapés, les séniors ou encore les bénéficiaires des minimas sociaux, par exemple. 

À une époque où de plus en plus de personnes font face à la précarité, alors que les classes moyennes se retrouvent coincées entre des revenus en baisse et des prix qui augmentent, la mission des assureurs de protéger le plus grand nombre apparaît comme une véritable priorité. Plusieurs professionnels rappellent d’ailleurs qu’il s’agit de la vocation originelle des assureurs. En effet, lorsque ce métier a vu le jour, l’inclusion et la mutualisation représentaient les valeurs fondamentales de la profession. Celles-ci semblent plus que jamais nécessaires pour des populations fragilisées par les crises financières et sanitaires qui se sont succédé ces dernières années.  

Si la situation reste préoccupante, quelques initiatives ont tout de même contribué à l’améliorer ces derniers temps. Pour commencer, la loi Lemoine, promulguée en 2022, a fait figure de révolution dans ce domaine. Pour faciliter l’accès à l’assurance emprunteur aux anciens malades ayant survécu à un cancer ou une hépatite C, elle a permis de réduire de moitié le délai du « droit à l’oubli ». Ainsi, 5 ans après leur guérison, ces anciens patients n’ont plus à déclarer leur maladie aux assureurs, alors qu’il leur fallait attendre 10 ans auparavant.

À cette loi s’ajoute la convention AERAS, pour s’Assurer et Emprunter avec un Risque Aggravé de Santé. Celle-ci simplifie également l’accès à l’assurance pour les individus présentant, comme son nom l’indique, des risques aggravés de santé. Elle impose notamment des normes à respecter pour les compagnies au moment d’évaluer les demandes de ces profils et limite les surprimes exigées à ces emprunteurs considérés « à risque ». Cette convention garantit aussi le droit à une information claire et transparente sur tous les facteurs pris en compte dans le calcul et sur les conditions exactes de la couverture proposée. 

Convention AERAS Schema

Côté assureurs, certains professionnels se montrent particulièrement en avance sur ce sujet. CNP assurance, par exemple, a annoncé la suppression des surprimes et renoncé à l’exclusion des femmes guéries d’un cancer du sein souhaitant souscrire une assurance emprunteur. Quelques organismes bancaires ont également effectué des transformations pour favoriser l’inclusion de personnes malades. Parmi les plus connus, le Crédit Agricole a cessé d’exclure les personnes atteintes de cancer du sein et de leur attribuer des surprimes depuis juin 2023. Par ailleurs, le Crédit Mutuel a aussi arrêté de soumettre certains demandeurs au questionnaire médical. 

Si plusieurs organismes financiers et assureurs acceptent de jouer le jeu en devenant plus inclusifs, certains continuent de barrer la route aux profils les plus vulnérables. Pour améliorer la situation, plusieurs combats restent à mener, à commencer par l’accessibilité financière et matérielle. En effet, l’un des principaux problèmes des populations dites « à risque », concerne le prix des assurances. Les tarifs proposés se révèlent souvent prohibitifs pour les individus à faibles revenus, qui peuvent aussi avoir besoin de conditions supplémentaires spécifiques. D’ailleurs, parmi les points d’amélioration pour rendre l’assurance plus inclusive, on trouve également la personnalisation des contrats. Les publics fragiles habituellement délaissés ne peuvent se retrouver dans les offres actuellement disponibles et recherchent des solutions adaptées à leurs cas, comme les agriculteurs ou bien les ménages à faibles revenus. 

De plus, comme évoqué plus haut, il demeure essentiel que les assureurs agissent au niveau de leurs politiques d’inclusion à la base, afin de favoriser l’égalité des chances pour tous les publics. Cependant, pour proposer plus de produits accessibles aux personnes fragiles, il s’avère également indispensable de faire en sorte que les compagnies d’assurance disposent des moyens matériels et financiers suffisants pour le faire. 

Les banques, les courtiers, les assureurs et même les assurés ont tous un rôle à jouer dans la mise en place d’assurances plus inclusives, chacun à leur niveau.

Les organismes financiers, et plus particulièrement les banques, font partie des premiers acteurs concernés pour rendre les assurances plus inclusives. Tout d’abord, elles doivent respecter la mise en place de la convention AERAS, facilitant l’accès à l’assurance emprunteur pour les personnes malades, tout en luttant contre la discrimination systématique de ce type de profils. Elles se doivent, en effet, d’étudier chaque demande avec attention, tout en proposant des solutions alternatives si l’assurance ne peut être accordée. 

Les courtiers en assurance jouent également un rôle de premier plan dans le développement d’une assurance plus inclusive, en adaptant leurs services aux publics exclus ou mal servis. Pour diminuer les pratiques discriminatoires et aider ces populations vulnérables à s’assurer, ils se doivent d’évaluer les situations de ces individus de façon personnalisée et de bien tenir compte des spécificités de chaque profil, afin d’identifier clairement leurs fragilités. Les courtiers recherchent ensuite des solutions répondant aux besoins et aux budgets de ces personnes, tout en leur prodiguant des conseils adaptés sur les types de couvertures nécessaires et existantes. 

Premiers publics concernés par la situation, les assurés aux profils dits « à risque » peuvent contribuer à faire avancer les choses en s’informant et en faisant entendre leurs voix. Pour commencer, il demeure primordial qu’ils indiquent leurs besoins spécifiques aux assureurs, pour que ceux-ci prennent conscience des difficultés auxquelles ils sont confrontés. Ensuite, ils peuvent s’organiser afin de créer des coopératives, par exemple, pour mieux mutualiser les risques encourus et proposer des couvertures réellement adaptées. Enfin, leur principale mission consiste sans doute à sensibiliser le grand public à cette cause si essentielle.

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